Eh bien voilà, ça fait presque huit mois maintenant que je suis parti du Pérou, et après en avoir publié les derniers articles, il est temps de terminer ce blog.
Je l'avais ouvert avant tout pour partager des photos et des anecdotes de mon quotidien à Lima avec mes proches, et puis petit à petit je n'ai plus fait qu'écrire sur mes voyages à l'intérieur du pays, ou presque.
La raison n'est pas que la capitale manque d'intérêt (vraiment pas !), mais plutôt ma tendance à vouloir profiter du moment présent en me disant qu'en un an, j'aurai largement le temps (et l'envie) de revenir pour prendre quelques photos. Mon appareil en a décidé autrement, mais pour tenter de me dédouaner de ma procrastination, j'ajouterai que Lima est une ville d'une complexité formidable, et il faut donc du temps, beaucoup de temps pour comprendre ne serait-ce qu'une partie infime de son fonctionnement ! On se rend vite compte que presque aucun liménien ne connaît Lima : beaucoup de gens connaissent seulement leur quartier et l'endroit où ils travaillent (en plus de quelques zones commerciales et de là où habitent leurs proches). La majeure partie de la ville est inconnue pour chaque liménien ou presque !
Lima est une ville à l'image du Pérou : immense, métisse, dynamique, en grande partie informelle, très contrastée et d'une diversité incroyable. Le passé, dur et rayonnant à la fois, est bien ancré dans le présent, mais ce dernier est indiscutablement tourné vers l'avenir.
L'avenir justement, les défis à relever sont gigantesques : la démocratie doit être consolidée pour qu'elle résiste à ceux qui tentent de la pervertir au service d'intérêts les plus sombres, des réformes fondamentales sont à mettre en place pour que la croissance soit durable et l'Etat doit acquérir la capacité de répondre aux attentes sociales légitimes que le boom économique génère.
Après un an passé à Lima, je suis très optimiste quant au devenir de ce pays et de cette ville. J'ai découvert un lieu incroyable, une société fascinante, de "tous les sangs" pour reprendre le titre d'un chef-d'œuvre péruvien, et avoir eu l'opportunité de faire partie de ce processus a été une expérience tout simplement magique.
Ce blog se termine par cette phrase, mais à travers les souvenirs et la façon dont elle m'a marqué, mon année à Lima continuera encore longtemps...
Un año en Lima
samedi 2 mars 2013
lundi 11 février 2013
District de La Punta, Callao
Pour profiter de l'été qui ne veut pas finir, rien de tel qu'une petite promenade à La Punta !
Callao et Lima son deux villes indissociables. La première
était le port de la deuxième, mais du fait de son rôle dans l’Histoire du
Pérou, cette ville a obtenu le statut de Province Constitutionnelle.
Aujourd’hui
c’est une ville populaire de presque 900 000 ‘‘chalacos’’, comme on les
appelle. Elle est divisée en 6 districts, l’un d’eux étant ‘‘La Punta’’, une
étroite bande de terre s’avançant vers l’océan et l’Isla San Lorenzo.
Ce
district, très éloigné de l’effervescence de la ville, est un lieu de promenade
apprécié et un quartier résidentiel de la classe moyenne-haute du fait de sa
valeur architecturale et historique. Certains des clubs sociaux les plus
exclusifs s’y sont installés.
Plusieurs amis en échange à Lima m’ont dit que c’est le
quartier qu’ils préfèrent. C’est loin d’être mon cas mais ce qui est sûr, c’est
que passer du temps dans cette ville et ne pas s’y rendre serait une aberration
!
Marcahuasi : otra vez !
Comme annoncé lorsque j’ai écrit sur notre première visite à
Marcahuasi, on y est retournés à la saison sèche : c’était même mon dernier
voyage hors de Lima, peu avant de repartir en France.
De retour à San Pedro de Casta, on se rend vite compte qu’on ne tiendra pas tous dans le seul bus de la journée (25 places) : en plus du groupe d’étudiant, les 16 touristes péruviens d’un autre groupe plus quelques autres veulent monter eux aussi. On arrive à avoir des places assises, au bord de la fenêtre côté ravin : le bus est bondé et surchargé, des gens sont debout serrés dans l’allée, pas une personne de plus ne peut monter et chacun a un gros sac à dos. On se rend compte que le ravin parait proche, on ne voit pas du tout la route en se collant à la fenêtre. Un constat s’impose vite : le bus penche ! Arrivé au ¾ du chemin, le chauffeur (un petit vieux) descend et remarque qu’une roue est crevée… Pendant tout le trajet, on a essayé de parler en permanence de quelque chose pour oublier la route, mais à chaque virage les mêmes rires crispés, suivis tout de suite d’un autre thème de conversation. S’il y a une route au bord des ravins dont je me souviendrai, c’est celle-là ! Quelle douce sensation que celle de retrouver la ‘‘terre ferme’’ une fois à Lima !
Sur la route de Chosica, on longe les Cerros du Cono Este. Plus au Sud de la ville, certains de ces Cerros sont complètement recouverts d'habitations. |
Même chemin, mais cette fois-ci on s’y rend en compagnie
d’un groupe d’étudiants de l’UNMSM (l’université péruvienne la plus
prestigieuse) avec un de leur professeur. Première nuit au village de San Pedro
de Casta : l’hôtel propose une chambre plutôt ‘‘rafraichissante’’ je
dirais. On se serait bien passés de cette caractéristique, qui est pourtant
appréciable dans certaines parties du Pérou, en plein hiver andin !
Le village de San Pedro de Casta |
Le lendemain, on monte jusqu’au site, en ayant acheté plus
de bois que la fois dernière (on tiendra seulement jusqu’à 8h le soir…). Pour
vivre l’expérience, et pour mon orgueil très certainement, je veux absolument
monter à pied, délesté de mon sac à dos qui accompagne des amis montés à cheval
pour leur premier séjour dans les Andes.
On se fait doubler par tout le monde, hommes, femmes, ânes, touristes à cheval et même troupeau de taureaux (j’ai encore en tête le : ‘‘Ecartez-vous !’’). Tout le monde sauf une petite vieille de 83 ans, presque aveugle, qui doit parcourir ce chemin tous les jours pour s’occuper de ses bêtes. Pas de chance, son corral est situé tout au bout du chemin, à 4000m d’altitude, et chaque journée commence donc pour elle par 3h de marche. On a passé une bonne partie de la montée à discuter : son quotidien force vraiment le respect.
Paysage andin durant de la matinée |
On se fait doubler par tout le monde, hommes, femmes, ânes, touristes à cheval et même troupeau de taureaux (j’ai encore en tête le : ‘‘Ecartez-vous !’’). Tout le monde sauf une petite vieille de 83 ans, presque aveugle, qui doit parcourir ce chemin tous les jours pour s’occuper de ses bêtes. Pas de chance, son corral est situé tout au bout du chemin, à 4000m d’altitude, et chaque journée commence donc pour elle par 3h de marche. On a passé une bonne partie de la montée à discuter : son quotidien force vraiment le respect.
Arrivés en haut, contrairement à la première fois, on peut
partir explorer les lieux. Au programme : se rendre au bord du précipice pour
vraiment se rendre compte de ce que l’on a fait en Novembre (c’est une fois avancé
sur la pierre que l’on prend conscience de la force du vent…) et faire un tour
du plateau rocheux.
On croisera un troupeau de chevaux et un groupe d’étudiants
(ou le contraire), une petite lagune au reflet remarquable, un cactus dont la
fleur rouge vif détonne vraiment dans cet environnement minéral que les
couleurs ont fui, et des ruines de l’époque Inca qui nous posent une question
centrale dans notre voyage au Pérou : mais pourquoi ?
... |
Pourquoi avoir choisi de vivre à cet endroit ?
La nuit sera encore une fois très difficile. Je ne parle pas
du taureau qui broute juste à l’entrée de notre tente et qui passera la nuit en
liberté parmi nous, mais de mon duvet ultra-compact acheté pour la jungle qui
combiné à la tente sans doublure (c’est juste la chambre sans la toile
extérieure) ne protège pas vraiment du froid : des goutes d’eau glacée me
tombent même dans le cou au petit matin… C’est une de ces nuits où, ne trouvant
pas le sommeil, on regarde l’heure en se disant ‘‘il doit être 4h, le jour va
bientôt se lever’’ avant de se prendre en pleine face la dure réalité : il
est à peine 11h du soir… On en vient à aimer le soleil de tout son être,
d’attendre avec une impatience qui ressemble bientôt à du désespoir ses rayons
divins. C’est peut-être pour cela que les Incas étaient ‘‘los hijos del Sol’’.
On entre dans un état presque second : au petit matin, on reparle de la
nuit entre nous, et c’est l’autre qui nous raconte ce que l’on a fait ou ce que
l’on a dit, sans que l’on ne soit capable de s’en souvenir.
L'amphithéâtre de Marcahuasi, sans nuages cette fois. |
De retour à San Pedro de Casta, on se rend vite compte qu’on ne tiendra pas tous dans le seul bus de la journée (25 places) : en plus du groupe d’étudiant, les 16 touristes péruviens d’un autre groupe plus quelques autres veulent monter eux aussi. On arrive à avoir des places assises, au bord de la fenêtre côté ravin : le bus est bondé et surchargé, des gens sont debout serrés dans l’allée, pas une personne de plus ne peut monter et chacun a un gros sac à dos. On se rend compte que le ravin parait proche, on ne voit pas du tout la route en se collant à la fenêtre. Un constat s’impose vite : le bus penche ! Arrivé au ¾ du chemin, le chauffeur (un petit vieux) descend et remarque qu’une roue est crevée… Pendant tout le trajet, on a essayé de parler en permanence de quelque chose pour oublier la route, mais à chaque virage les mêmes rires crispés, suivis tout de suite d’un autre thème de conversation. S’il y a une route au bord des ravins dont je me souviendrai, c’est celle-là ! Quelle douce sensation que celle de retrouver la ‘‘terre ferme’’ une fois à Lima !
samedi 9 février 2013
Cuzco et la Vallée Sacrée
Arrêt petit déjeuner peu avant Abancay, sur la route de Cuzco |
Début juin, après y avoir pas mal réfléchi, départ en bus
pour Cuzco, capitale de l’ancien Empire Inca. Au programme : 5 jours dans
la ville et dans la Vallée Sacrée toute proche. Le voyage devait se poursuivre
vers le lac Titicaca et/ou Arequipa, mais ma carte bancaire bloquée en aura
décidé autrement (on ne peut payer le bus entre Cuzco et ces endroits qu’en
liquide). La raison ? Cuzco est magnifique, mais Cuzco est inondée de
touristes et très chère. Cette concentration ne donne qu’une envie : fuir le
lieu. Mais sa beauté et son histoire le rendent incontournable (ceci entraîne cela…).
Dimanche matin sur la Plaza de Armas de Cuzco |
Bref après presque un an passé au Pérou à voyager à droite à
gauche en se décidant au dernier moment, c’est vraiment dur se mettre en tête
qu’il faut prévoir à l’avance, faire des réservations. Mis à part un restaurant
pour un groupe de 10 personnes à Lima, on n’avait rien réservé de l’année. C’est
stupide, mais on se sent comme privés de liberté, ce n’est pas du tout la
manière de voyager et découvrir qui m’attire.
Iglesia de San Blas, sur la Plaza de Armas |
L’industrie est très bien rodée : les hôtels sont 2,5
fois plus cher que dans les autres lieux touristiques du pays, pour manger c’est
pareil et la nourriture tout sauf bonne, c’est un parcours du combattant que d’acheter
un billet étudiant pour le Machu Picchu (il faut se rendre au ministère de la
culture, loin du centre, dans une rue qu’aucun taxi ne connait : on a
tourné en rond plus d’une demi-heure). A partir d’Ollantaytambo, aucune route
ne mène à Aguas Calientes, le village par lequel tout le monde doit passer au
pied du Machu Picchu. Il n’y a qu’un train dont le billet le moins cher est à
50 dollars aller simple pour 1h30 de trajet à peine (100 dollar depuis Cuzco). Une
alternative quand même : une piste non asphaltée qui en 6 ou 7 heures nous
y mène, mais là encore le transport est plus cher qu’ailleurs, et les
chauffeurs sont vraiment des bons tarés (ça ne sert à rien de prendre cette
route pour découvrir le Pérou ‘‘hors des sentiers battus’’.
Rue de Cuzco : édifice colonial sur une base Inca |
Le bus qui nous emmène
de Aguas Calientes au MP coûte 17 dollars aller/retour pour à peine 30 minutes
de montée, pas de tarif étudiant pour les étrangers bien sûr, et pour visiter
les sites de la vallée sacrée il faut obligatoirement acheter un billet
touristique (vraiment cher), payer l’entrée d’un seul site ou de deux n’est pas
possible. Bref, le tourisme est utilisé pour générer un fric monstre, mais l’activité
n’a aucune répercussion sur les habitants de la région en dehors de ceux proches
des sites. Les monopoles, privés pour la plupart mais qui sont tout sauf naturels
(en gros, l’Etat permet leur maintient), s’en donnent à cœur joie !
Sacsayhuamán, citadelle dominant la ville de Cuzco. La taille des pierres, qui ont été amenées sur ce lieu par une civilisation qui ne connaissait pas la roue, est impressionnante. |
En bref, Cuzco et le Machu Picchu, symbole du Pérou pour l’immense
majorité, n’ont rien à voir avec le reste du pays. Je suis content d’y être
allé, les sites sont tout simplement incroyables, mais je n’y remettrai pas les
pieds comme ça, et je n’en ferai pas plus la promo : le Pérou offre
tellement d’autres choses, qui font passer de bien meilleurs moments.
La perfection Quechua : le site de Ollantaytambo dominant la vallée de l'Urubamba |
Vue sur une partie des terrasses de Ollantaytambo |
Amanecer en Machu Picchu |
El Templo del Sol |
Retour à Lima avec seulement 0,25€ en poche, sans avoir pu acheter à boire ou à manger pour le trajet du retour... |
vendredi 8 février 2013
Chachas - chez le peuple des nuages
Cette fois-ci, nous partons à 3 pour une semaine autour de
Chachapoyas, sûrement l’une des villes les plus isolées du Pérou, dans le
département d’Amazonas. Comme son nom ne l’indique pas, ce département n’est
pas vraiment en Amazonie : au Pérou on appelle cette zone ‘‘le sourcil de
la jungle’’, des forêts tropicales d’altitude, entre 1000m et 3000m environs,
perdues au milieu des nuages. C’est pour cette raison que l’Empire Inca, en
arrivant dans la région pour la conquérir, appela ‘‘Chachapoyas’’ le peuple qui
y vivait : le peuple des nuages.
Tombée de la nuit à Chachapoyas |
C’est donc après 22h de bus que nous arrivons à destination,
sous une pluie glaciale et battante. La majorité des rues ne sont pas pavées
(la saison des pluies a fait son travail de destruction) et sont donc couvertes
de boue. L’hôtel n’est pas chauffé… Vivement le premier mate de coca,
l’aventure n’a pas commencé qu’il nous manque déjà. Après avoir discuté un peu
avec le propriétaire de l’hotel, regardé une carte touristique et nos
différents guides, on se rend compte qu’une semaine pour visiter la région, ça
fait très court ! La vallée de l’Utcubamba a tellement à offrir.
Rue commerçante du centre |
Deuxième jour, après un petit déjeuner au marché accompagnés
d’une petite, toute petite vieille qui parle de manière incompréhensible (même
les commerçantes n’y arrivent pas), on prend le transport collectif en direction de Gocta,
une cascade en deux niveaux qui mesure plus de 771m en tout. Preuve de
l’éloignement de cette région, la cascade, pourtant située à seulement 10km de
la route principale, n’était connue que des habitants jusqu’en 2005. On pensait
devoir marcher 2h, en fait ca sera 11km assez pentus plus 2h (merci le bouquin !).
Un 4x4 de la municipalité nous sauvera la journée, car il n’y a aucun autre
moyen de transport pour rejoindre le village de Cocachimba. Depuis 2005, ce
village d’environs 114 familles a vu son niveau de vie s’améliorer
considérablement, car plus de 70 d’entre-elles bénéficient directement du
tourisme, cela grâce à un système de rotation entre guides et gardiens. Un
exemple de l’impact positif que peut avoir le tourisme sur une communauté si
l’activité est gérée par les habitants, de manière responsable !
Llegando a Cocachimba |
Nous parcourons donc les 2 km qui nous séparent de la
cascade sur un sentier très escarpé, à travers champs au début, puis à travers
la forêt primaire pour arriver sous la pluie aux pieds de la géante. Son
souffle est incroyable, on se prend une douche en quelques secondes, des nuages
s’élèvent de la chute d’eau, l’endroit est désolé au milieu de la forêt
luxuriante, on en prend vraiment plein la vue ! Sur le chemin du retour,
fatigués par la marche sur le sentier boueux qui monte et descend sans arrêt,
les vêtements trempés, on se prend à rêver d’hôtel de luxe, de spa, de jacuzzis
et de massages pour oublier l’austère réalité qui nous attend : douche
tiède avec le vent glacial qui passe par la fenêtre sans vitre. Arrivés à
hauteur de la maison qui sert de bodega (petite boutique qui vend tous les
biens basiques au Pérou), je décide d’aller m’acheter à boire. La femme
m’accueille et tout de suite, l’odeur me rappelle un moment de mon enfance que
je ne peux pas resituer (l’auvergne ?) : elle préparait deux des eaux
de vie locales, l’une à l’ananas, l’autre à je ne sais plus quoi. Toutes les
personnes que nous avons rencontré à Cocachimba nous ont accueilli très
chaleureusement en partageant ce qu’ils ont, et je suis donc invité à goûter
deux verres de ces breuvages, qui me redonneront du courage pour la suite du
chemin : je le terminerai en passant mon temps à éructer un air au goût
d’ananas, très chargé en alcool. Je ne
peux pas fournir la recette, mais en tout cas c’est de la bonne ! Le
chemin est en effet plus facile après.
... |
Vient le moment de partir. La nuit tombe, et il n’y a plus
de transport public pour Chachapoyas à cette heure. Nous irons donc en stop, et
le premier véhicule croisé sera le bon : un camion transportant des
caisses de bouteilles de bière vides. Plus de place dans la cabine, nous
montons sur les caisses, seulement en partie recouvertes d’une bâche, et nous
partons pour une heure de route en plein vent, dans une odeur de bière froide.
C’est l’une des plus belles expériences de mon année au Pérou, qui m’a valu une
toux de plus d’un mois, mais qui nous a fait sentir qu’on était vraiment en
Amérique du Sud. La route serpentait dans une vallée très encaissée, le long de
la rivière Utcubamba, sous le ciel étoilé et un croissant de lune parfaitement
en bas du cercle (je n’avais jamais vu ça). Le vent en pleine figure, le fait
d’être assis juste au dessus de la cabine du chauffeur (exactement comme les
livres de mon enfance !), partager ça avec mes amies, tous ces détails ont
fait de ce bout de chemin un moment magique ! Un petit repas dans la rue
en arrivant (brochettes de cœur de bœuf et trippes sur le barbecue) pour 0,25€,
et une bonne nuit de sommeil après avoir profité d’une journée de rêve.
Fin d'après-midi près de Gocta. Comme dit la chanson :
‘‘Sé que va a llover, y el camino es culebrero…’’
|
Le lendemain, direction Lamud, village seulement accessible
en colectivo (taxi qui part lorsqu’il est plein) par un chemin non asphalté à
flanc de falaise.
Plaza de Armas de Lamud |
La majorité des maisons sont là aussi en adobe, et il est
possible de partir visiter une grotte de 500m de long dans la montagne proche.
L’entrée était un cimetière (il reste quelques ossements et quelques crânes qui
n’ont pas été pillés), puis en s’avançant on découvre de nombreux stalactites
et stalagmites, certains vraiment impressionnants.
Eteindre toutes les lumières
dans les entrailles de la terre nous a permis, sûrement pour la première fois,
de voir l’obscurité absolue (ça peut se dire ?) et d’expérimenter cette
sensation étrange.
Sur le retour, on se promène dans le village sans croiser
personne ou presque, puis après un trajet en moto-taxi, on change de transport
à Luya pour rejoindre Chachapoyas. En cherchant un tour pour visiter la
forteresse de Kuélap le lendemain, on tombe sur un archéologue français qui
nous explique pas mal de choses sur la grotte que l’on a visité (pourquoi les
plafonds sont parfaitement ronds avec des lignes parfaitement droites et perpendiculaires
au milieu ?), la faune et le peuplement de l’Amazonie il y a plusieurs
millénaires (notamment des paresseux de 8m de haut), et qui nous donne quelques
idées pour un prochain voyage…
Une maison assez représentative de Lamud, et des villages de la Sierra |
Le 24 Mai, nous voilà parti pour Kuélap avec un petit
groupe. Le site peut être comparé au Machu Picchu sur de nombreux aspects, mais
il est peu fréquenté, et le coût de la visite est infime comparée à celui de la
star nationale !
Décoration typique du peuple Chachapoyas |
Le décor est moins majestueux, la forteresse se trouvant
au point le plus haut de la région, mais l’architecture Chachapoya
impressionne : les maisons circulaires au milieu desquels étaient enterrés
les morts, les décorations qui ornent certains murs, le premier édifice
américain dont la surface de la base est inférieure à celle du haut si j’ai
bien compris, l’imposant rempart, atteignant 6m à certains endroits, construit à d'autres endroits à
seulement 30cm du ravin, l’accès très étroit et pentu qui rendait la prise du
lieu presque impossible pour une armée ennemie. C'est une vraie chance de pouvoir se
rendre sur ce site admirable avant qu’il ne devienne trop fréquenté.
Mur d'enceinte de la forteresse |
Base d’une maison, au bord du mur d’enceinte |
Sur le retour, le repas du midi sera l’occasion de faire une nouvelle découverte culinaire. J’ai adoré la cecina de la jungle, qui se trouve en Amazonie mais aussi à Lima sur certains marchés, mais celle des Andes est très différente : c’est de la viande séchée qui se mastique en la détachant presque fil par fil. Ce n’est pas mauvais du tout, mais c’est décevant quand on s’attend à cette merveille amazonienne !
Après nous être mis d’accord sur ce que chacun allait faire,
nous décidons de prendre un mini-bus le lendemain, seul transport public
capable de nous emmener à Cajamarca, en passant par Celendín. J’avais lu en
France que cette route, impraticable en saison des pluies, était vraiment
magnifique, et une photo m’avait donné envie de ne pas la manquer. Départ vers
5h pour une arrivée prévue à 21h, presque pas d’asphalte et places à l’arrière
du bus : la journée s’annonce mouvementée. Et elle le sera : je me
suis endormi sur la banquette arrière, allongé la tête sur un pull, et la route
m’a tellement fait décoller pendant mon sommeil que je me suis râpé l’oreille
sur le compartiment à bagage : le saut a du être de plus d’un mètre. Après
une courte pause petit déjeuner à Leimebamba, très joli village toujours dans
la vallée de l’Utcubamba, la route commence à grimper dans les montagnes.
Iglesia de Leimebamba |
Nous
sommes dans la partie orientale des Andes, celle qui reçoit la pluie, est
couverte d’herbes ou de forêts : les Andes vertes. Après avoir passé un
col, en quelques minutes nous nous retrouvons du côté Atlantique de la
cordillère, les Andes jaunes, ou seuls quelques cactus et petits arbres
ressemblant à des baobabs poussent au milieu de la poussière et des roches. Ce
changement de décors est impressionnant, mais ce qui l’est encore plus, c’est
de voir le Río Marañon, la rivière qui forme l’Amazone, couler paisiblement au
milieu du désert.
Le Marañon, au niveau du village de Balsas |
Après quelques sensations fortes, pleins de paysages sublimes
gravés dans la mémoire et un autre film Nord-Américain qui sature les oreilles,
nous voici à Cajamarca, ville Andine qui fut le lieu de rencontre entre
Atahualpa et Pizarro, le noble Inca et l’ancien éleveur de porc devenu
guerrier.
A l'intérieur du Complejo de Belén |
Cajamarca et Celendín ont fait l’actualité du Pérou en 2011
et 2012 car un projet minier (le projet ‘‘Conga’’) prévoyait de rayer de la
carte deux bassins d’eau. La mobilisation de la population a été très forte,
énormément de manifestations ayant eu lieu jusqu’à Lima pour dire que ‘‘Conga
no va’’, Conga ne passera pas, ‘‘Agua sí, Oro no’’, oui à l’eau, non à l’or.
Les concerts, les murs de la ville, le message a utilisé tous les supports
possibles, avec de grands résultats s’ils sont replacés dans le contexte
historique du continent : l’entreprise à du réétudier l’impact
environnemental de son investissement, des experts étrangers en questions
environnementales sont venus étudier la situation pour déterminer le coût du
projet pour la communauté, et donc les compensations à verser, et le projet a
fini par être bloqué jusqu’à ce qu’une meilleure solution soit trouvée
concernant les deux bassins. Mais la mobilisation a été très dure, plusieurs
grèves générales ont paralysé ces deux villes, avec pour réponse l’instauration
de l’état d’urgence et des affrontements qui ont coûté la vie à de nombreuses
personnes.
Cajamarca |
C’est donc pendant une trêve de quelques semaines, quelques
jours seulement avant la reprise de la grève générale que l’on a pu passer une
journée dans cette ville coloniale (tous les bâtiments incas ont été rasés,
sauf le ‘‘Cuarto del Rescate’’, pièce où a été versé la mythique rançon
d’Atahualpa). Nous avons découvert un endroit qui nous a surpris par sa
douceur : tard le soir, des groupes de jeunes jouaient de la guitare et
chantaient sur la place, presque toutes les bodegas (épiceries) proposaient une
‘‘dégustation’’ d’alcool ce qui ne manquait pas d’attirer du monde (mineurs y
compris…). L’atmosphère était vraiment décontractée (je crois que c’est la
seule ville péruvienne où j’ai pu m’assoir dans l’herbe d’un parc, hors malecón
de Miraflores), les bâtiments coloniaux magnifiques, le mirador qui surplombe
la ville bien aménagé.
Iglesia San Francisco, sur la Plaza de Armas de Cajamarca |
Cette ville est souvent citée comme exemple de mauvaise
gestion publique à Lima, mais si Lima était entretenue comme l’est Cajamarca ou
Trujillo, elle aurait une autre allure ! C’est vraiment dommage de n’avoir
eu qu’une journée, d’autant plus que les alentours abritent quelques merveilles
du plus grand empire Sud-Américain.
Peau de porc prête pour préparer le Chicharrón cajamarquino |
Le marché de Cajamarca vaut vraiment le détour,
notamment la partie boucherie pour voir les femmes découper les pièces à la
hache sur des billauds en bois.
Une petite faim ? |
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